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Revue des marques : numéro 87 - juillet 2014
 

Marque et e-commerce : vers un marketing de la différence et de l’attention !

L’heure n’est plus à l’abondance, mais à la singularité. Cela concerne bien sûr les marques et leur communication. Elles doivent, tout en demeurant cohérentes avec elles-mêmes, s’adresser à des agrégats hétérogènes.

par Edouard Rencker


Edouard Rencker
Edouard Rencker
Président de Makheia
« C’est une révolte ? Non sire, c’est une révolution. » La paraphrase du célèbre dialogue entre Louis XVI et La Rochefoucauld, au lendemain de la prise de la Bastille, illustre avec saveur la nouvelle donne des marques face au digital. Car la plupart sont en effet confrontées à un discret mais spectaculaire bouleversement. Deux phénomènes majeurs en témoignent. Premièrement, la fin de ce que l’on pourrait appeler « l’utopie de la profusion ». La singularité est devenue le nouveau paradigme des sociétés « digitalisées ». En moins de vingt ans, la société française est passée d’un modèle « stratifié », autour de classes sociales établies, à un kaléidoscope de comportements et de tendances. Les tribus « consuméristes » comme les appelle le sociologue Michel Maffesoli ont explosé. Aujourd’hui, s’habiller comme son voisin ou écouter la même musique est « ringard ». On est rap ou rock, classique ou jazz, techno ou R&B. Voiture ou vélo. L’ère est à l’individualisation. La crise de consommation que traversent les économies modernes depuis 2008 est l’expression de la fin de cette mythologie de « l’abondance » ayant instauré la consommation de masse comme moteur du désir ! D’où la mort d’un dogme : celui d’une communication également de masse assise sur « un message, une cible, un media », mesurée par des indicateurs essentiellement volumétriques, du type GRP. Deuxièmement, en devenant singulière, la consommation a généré la mutation d’une économie séquentielle à une économie de flux. Chiffre spectaculaire : Eric Beinhocker, professeur à Harvard, estime qu’un citoyen « normal » de New York peut aujourd’hui avoir accès, grâce à Internet, à environ dix milliards d’objets ! Il y a cinq cents ans, ce chiffre était à peine de deux cents. Un « hyper-choix » propulsé par la révolution digitale. Demain, c’est à dire vers 2020, ce choix sera multiplié encore par dix ; notamment grâce aux technologies dites « d’impression 3D ». Le monde est devenu un flux. En matière d’information, l’humanité produit désormais en deux jours une quantité égale à celle produite entre l’an 20 000 avant notre ère et 2003. Et le volume doublerait tous les quatre ans. L’histoire du monde est (re) produite tous les deux jours ! Illustration : il y a cinq ans Twitter n’existait pas ! Ce qui fait dire à l’essayiste Philippe Bloch (Ne me dites plus jamais bon courage ! (1) ) : « La reconduction permanente et systématique des mêmes méthodes n’a plus la moindre validité à l’heure de Google, Twitter, Instagram, Spotify, Deezer ».
 

La pub est morte ! Vive la communication (2)

La pub est morte ! Vive la communication
Ces bouleversements ont généré, pour les marques, trois conséquences majeures. L’inefficacité totale des vieilles techniques de com’ à répondre aux nouveaux impératifs de « cibles », devenues des publics, avertis, exigeants, réactifs, participatifs. La « mort » de la fameuse « ménagère de moins de cinquante ans », (agrégat inventé dans les années 1960) récemment remplacée par les « digital mum’s », a acté la fin des « cibles marketing » homogènes et passives : la relation entre les marques et leurs publics a été inversée. Deuxièmement, s’adressant désormais à des « tribus », mouvantes, hétérogènes, imprévisibles et agrégées autour d’envies et de représentations symboliques communes, les marques sont obligées de travailler de façon de plus en plus subtile les signes qu’elles émettent. La difficulté est donc d’équilibrer une multiplicité de signes en conservant une homogénéité de discours : être cohérent avec l’ADN de marque, véhiculer une éthique, tout en s’adressant à des agrégats hétérogènes. Dans un monde digital global qui favorise la transparence et la propagation rapide des réactions des consommateurs, la cohérence et l’unicité sont deux facteurs déterminants de crédibilité.

Troisième conséquence, il faut revoir les règles fondamentales de prise de parole des entreprises et réhabiliter la communication ! Sous la pression médiatique permanente, la marque est, parfois, devenue un porte-voix brouillon de messages complexes. Il est indispensable de revenir à l’étymologie de la communication : « mettre en commun », « être en relation avec ». Pas manipuler, influencer ou contraindre.
La pub est morte ! Vive la communication
La communication doit retrouver sa fonction, sa légitimité : celle de connecter, d’expliquer et de fluidifier les relations. Entre les individus, entre les organisations, entre les signes. Il s’agit, pour les marques, de comprendre comment chaque message, chaque proposition, chaque modalité participe au cycle qui alimente le lien, depuis la découverte d’une nouveauté à l’acte d’achat, voire à la recommandation. Cela passe par de nouvelles méthodologies, mais surtout par un rapport plus « vrai », plus sincère avec les publics ; et par l’apprentissage d’une culture des différences et des relations. Pas dans la reproduction mécanique du « rouleau compresseur » de la pub !
 

Notes

(1) Ventana Éditions, 2013
(2) Éditions de L’Archipel, 2014
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