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Revue des marques : numéro 82 - avril 2013
 

Système U, le pays où la vie est précieuse

Si la marque U acquiert peu à peu son statut de marque, cela se fait en bonne intelligence et harmonie avec les marques de fabricants.

Entretien avec Serge Papin, Président de Système U


Serge Papin
Serge Papin

Le partenariat commerce-industrie s'est-il, depuis vingt ans, renforcé grâce à de nouveaux outils et modes de management ? Le partage des données clients est-il effectif ?

Serge Papin : Soulignons un paradoxe : d'un côté, des négociations toujours tendues, de l'autre, des occasions plus nombreuses de partenariats. J'avais, un moment, suggéré l'idée de négocier tous les deux ans, mais sans succès. Côté partenariat, distributeurs et industriels se retrouvent dans le partage de l'information, les bases de données clients, pour mieux comprendre et traduire les attentes des consommateurs ; ils collaborent davantage dans la maîtrise des flux logistiques pour une plus grande maîtrise des réassorts, mieux travailler l'alloti chez l'industriel. Le partenariat devra se renforcer, car distributeurs et industriels partagent des enjeux identiques sur Internet et devront, de ce fait, échanger encore plus.
 

Quel est l'impact du changement de génération ?

Serge Papin : La génération actuelle a une meilleure connaissance de l'ensemble du processus et n'est plus seulement polarisée sur la seule négociation. Elle s'intéresse à la production, à la transformation. Nous engageons des collaborateurs qui ont, de plus en plus, une formation d'ingénieur, biologiste par exemple.

Quelle place pour le category management chez Système U ?

Serge Papin : Il est central depuis vingt ans, c'est notre maître mot et nous en avons fait un modèle de la structuration de notre offre. Nous avons été les premiers à le mettre en pratique de manière industrielle. Nous l'adaptons au nouveau contexte.

Comment a évolué le partage de la valeur ajoutée ?

Serge Papin : Il faut distinguer les très grandes marques de celles des PME. Les chiffres témoignent que les grands groupes se portent plutôt bien, tandis que les PME souffrent, particulièrement les entreprises franco-françaises. La LME est une loi faite pour les grands groupes, aussi serait-il pertinent de la revisiter pour rendre le partage de la valeur plus équilibré sans tout remettre en cause.

Comment évolue la segmentation marque discount, coeur de marché, marque thématique chez Système U ?

Serge Papin : Dans la mesure où nous souhaitons faire de la marque U une marque globale, lui donner un statut de marque, nous agissons comme les industriels en déclinant avec des offres premium, des offres standards et des offres thématiques puisque notre marque est présente sur tous les registres de l'offre, alimentaire et hors alimentaire. Nous adaptons la thématique à la catégorie de produit et au positionnement qualitatif. Nous utilisons les mêmes ressorts que les marques de fabricants.

Jusqu'où aller dans l'offre MDD ?

Serge Papin : Nous irons jusqu'où le client nous suivra. Pour autant, un plafond semble avoir été atteint, un équilibre entre la marque distributeur et la marque de fabricant est nécessaire pour que le client puisse avoir un choix qui lui convient. Il est vrai que, chez Système U, plus un magasin est petit, plus la part relative des MDD est grande, quand le choix est plus grand dans un grand magasin.
Aujourd'hui, nous stoppons le développement en nombre de nos marques propres pour travailler davantage la qualité, ce qui nous conduit à prendre des positions fortes sur les engagements sociétaux, environnementaux et sur la santé.

Comment s'exprime l'engagement U ?

Serge Papin : Le slogan « Le commerce qui profite à tous » donne la primauté à l'économie locale. Le commerce, c'est, en particulier, de l'argent qui circule et nous souhaitons qu'il irrigue le territoire local, le pays où l'on vit, aussi bien chez les agriculteurs, les transformateurs, les artisans, les collaborateurs du magasin, etc. Le magasin se positionne comme un poumon économique du territoire.

En faisant de la disparition des ingrédients sensibles un axe prioritaire, ne risquez-vous pas de jeter l'opprobre sur ceux qui agissent autrement (Nutella et l'huile de palme en particulier) et de réveiller les peurs des consommateurs. ?

Serge Papin : Le risque existe mais il reste marginal. Système U entend ouvrir des voies de progrès, regarder devant lui, faire oeuvre de précurseur ; et nous allons continuer à avancer, sans dogmatisme, ni accusation. Nous ne voulons en aucun cas jeter l'opprobre. C'est devenu un axe majeur de notre communication et de l'identité de nos produits. Nous avons été les premiers à nous passer des parabènes, quand à l'époque L'Oréal ne semblait pas s'y intéresser. Depuis, le groupe les a retirés de ses produits ! PepsiCo et Orangina suppriment l'aspartame d'une partie de leurs gammes. Tout le monde aujourd'hui, même les agriculteurs, diminue les intrants chimiques et les pesticides.

La fin de l'hyper est-elle programmée ? Quel sera le magasin de demain ?

Serge Papin : Oui, car le modèle du très grand hyper dans lequel les gens venaient faire leurs courses pour plusieurs semaines, remplissant plusieurs chariots, semble derrière nous. Aujourd'hui, le consommateur souhaite acheter le produit dans son unité de conditionnement normal, tous les jours et au prix le plus bas possible, ce que permet le supermarché de proximité. Le modèle de l'hypermarché, qui reposait sur la puissance promotionnelle, la consommation quantitative et ses gros caddies et les ventes hors alimentaire, est attaqué sur ces trois anciens atouts. Cdiscount, Amazon et bien d'autres pure players viennent tailler quelques croupières sur le terrain du non alimentaire. Nous sommes entrés dans l'ère de la consommation plus intelligente, du consommer mieux, le consommateur exerce son pouvoir d'acheter. Aussi allons-nous assister à une lente érosion de l'hypermarché. Le magasin de demain sera à taille humaine, accessible, il conjuguera les achats plaisirs avec une offre de services, quand Internet sera dédié aux achats pondéreux, aux achats « corvées ». La taille moyenne des magasins va donc diminuer et l'organisation des commandes sur Internet va se développer.

Quelles catégories de produit le drive peut-il pénaliser ?

Serge Papin : Le drive a tendance à rabattre bon nombre d'achats sur Internet. Aussi devons-nous engager des discussions avec les marques de fabricants, car le modèle de l'achat d'impulsion bat de l'aile. Il nous revient, à nous distributeurs, de faire toujours venir les gens dans le magasin, celui-ci devant être davantage orienté vers le shopping, l'achat plaisir. Le magasin doit être plus séduisant, offrir plus de services dans les produits de métiers, par exemple, les boucheries, charcuteries, boulangeries. Il faut également repenser avec les industriels le modèle pour proposer dans le portail une offre séduction.

Quel type de communication Système U décline-t-il pour les marques de fabricants ?

Serge Papin : Rappelons que Système U est l'enseigne de supermarché qui détient le plus grand nombre de marques de fabricants ; nous avons le taux de nourriture le plus élevé, ce qui est à mettre en corrélation avec la présence forte des marques de fabricants. Sur le plan de la communication, les marques sont toujours présentes, aussi bien à la radio que sur nos prospectus et dans nos outils corporate internes comme, par exemple, notre revue U Mag, diffusée à nos 65 000 collaborateurs, et qui apporte à chaque numéro un éclairage sur deux à trois marques de fabricants. La communication entre notre enseigne et les marques est fondée sur une relation d'amour, même si, parfois, comme dans tous les couples, il y a des hauts et des bas.

Quel changement la publicité TV a-t-elle apporté à Système U, lauréat du grand prix Effie 2012 ?

Serge Papin : La possibilité d'accéder à la télévision nous a permis de progresser en notoriété. Jusqu'alors, nous avions une bonne image auprès de nos clients, mais « U la discrète » souffrait d'un déficit de notoriété. Nous sommes, depuis, entrés dans la cour des grands. Depuis 2007, nous avons la même communication, une constance qui fait notre force et qui laisse des traces dans l'esprit des consommateurs.

Que faire face à la distorsion de concurrence induite par le e-commerce (Amazon…) sur le plan de la fiscalité, des heures d'ouverture, de l'ouverture de surface, des subventions…

Serge Papin : Je dénonce l'aide apportée par les pouvoirs publics par exemple à Amazon, qui ne paye aucun impôt, aucune taxe en France (taxe sur les grandes surfaces), qui ne fait aucune formation et dont les emplois sont subventionnés. Il ouvre 24 h/24 quand l'ouverture le dimanche pour le commerce traditionnel fait débat. Il faut donc repenser le modèle en terme de fiscalité, de protection sociale.

Que révèle le départ de Système U de la FCD ? Indépendants et groupes intégrés : « pas le même combat » ?

Serge Papin : Oui, le modèle intégré diffère de celui du commerce indépendant. Cela ne nous empêchera pas de nous retrouver sur de grands enjeux.

Quels sont les enjeux de demain (consommer mieux, le retour du vrac, la lutte contre le gaspillage…) ?

Serge Papin : Le premier enjeu pour Système U est de bien tenir ses positions, de rester dans son sillon, de faire preuve de constance, garder notre leadership dans l'alimentaire et les PGC en général. Nous allons adapter notre offre hors alimentaire à la nouvelle donne, la location, car la valeur d'usage prend le pas sur la valeur de propriété. Nous allons également agir pour éduquer les consommateurs à lutter contre le gaspillage, faire plus de pédagogie. C'est plus de 450 kg qui, chaque année, sont jetés par ménage et 7 kg dont le packaging n'a pas été ouvert ! Nous avons, par ailleurs en interne, des grands enjeux de formation pour garder la fidélité aux métiers issus de l'artisanat, des enjeux de transmission, comme aider financièrement les jeunes pour qu'ils accèdent à la fonction de chef d'entreprise, et des enjeux de transmission sur le plan de la gouvernance du groupe !

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