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Revue des Marques - numéro 53 - Janvier 2006
 

Le "nouveau luxe", enjeux et perspectives

Le champ de bataille du luxe s'élargit. La conquête de parts de marché conduit les grandes maisons du luxe à créer le segment du "nouveau luxe". Enjeux et risques selon une étude réalisée par le cabinet Advancy Consulting Team.

Entretien avec Laurence-Anne Parent, Directeur Associé Advancy Consulting Team. Propos recueillis par Jean WATIN-AUGOUARD.



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Quelles sont les raisons qui ont présidé au lancement de votre étude sur le “nouveau luxe” ?

Laurence-Anne Parent : Deux constats au moins motivent cette étude. Le premier porte sur la pression que le marché exerce sur la majorité des grandes maisons de luxe cotées qui, pour afficher des taux de croissance de plus de 15 % par an, sont obligées de repousser les frontières du luxe. Fini le temps du schéma traditionnel des marques de luxe qui ouvrent "leur" magasin dans la rue principale des grandes capitales. Louis Vuitton, qui vient de rouvrir son vaisseau amiral aux Champs Elysées, compte aujourd'hui environ 350 boutiques dans le monde. Deuxième constat : le marché des consommateurs de luxe n'est plus celui d'hier. La vision traditionnelle fondée sur la dichotomie clients du luxe/non clients du luxe est périmée. Une part de plus en plus large de la population devient consommatrice occasionnelle de luxe, certes sur des produits et des budgets différents mais elle arbitre différemment ses dépenses avec un peu de hard discount pour quelques produits de luxe.



Comment se caractérise ce "nouveau luxe" ?

L-A P. : Il se caractérise notamment par l'intégration de la distribution, l'ouverture de magasins en propre, le rachat de marques pour accéder à un marché non couvert et un pari fort sur les accessoires, la maroquinerie, produits à plus forte marge pour chercher de nouveaux clients sur d'autres produits, comme une offre à vingt euros chez Dior ou cinquante euros chez Hermès. L'univers des parfums se caractérise par le lancement des éphémères, des produits d'entrée de gamme proposés dans des contenants plus petits et dotés d'un petit budget de communication. Toutes les marques adoptent peu ou prou la même stratégie.



Cette stratégie est-elle pertinente ?

L-A P. : Certaines marques sont rentables, d'autres moins. Pour atteindre davantage de clients, il faut nécessairement se rapprocher d'eux. Les dépenses en communication explosent mais leur impact sur le consommateur final diminue car elles sont diluées sur un nombre croissant de produits voire de marques. Le développement de magasins en propre est une stratégie coûteuse en termes de force de vente, de merchandising, d'extension de gammes qui créent de la complexité. Les marques qui ont mesuré ce risque, gèrent de manière optimale le mix des catégories de produits et des magasins. Hermès, exemple de réussite, a la moitié de ses magasins en propre et l'autre en franchise. Or ce statut, beaucoup moins coûteux, a longtemps été banni par le luxe par crainte de diluer son image, de perdre son âme. Hermès choisit le même mix pour équilibrer ses catégories de produits dans son offre globale.

Autre succès, Louis Vuitton, véritable machine de guerre fondée sur un savoir-faire maîtrisé dans l'univers de la maroquinerie avec beaucoup de volume sur peu de références et une parfaite connaissance des ventes à la référence dans chaque magasin. Même réflexe chez Dior où l'on pense clientèle avant de penser produit.Dans de nombreuses maisons de luxe, le manager, souvent venu de l'univers de la grande consommation, prend le pas sur le créateur avec, en amont, une bonne visibilité des équilibres financiers. Le temps où les marques créaient des produits puis les "poussaient" par la communication est révolu. L'enjeu est de continuer à construire la marque sur l'exceptionnel tout en créant des produits adaptés à chaque cible clientèle.



Le temps où les marques créaient des produits puis les "poussaient" par la communication est révolu. L'enjeu est de continuer à construire la marque sur l'exceptionnel tout en créant des produits adaptés à chaque cible clientèle.


Porté par la "démocratisation", le luxe ne serait-il plus synonyme de distance ?

L-A P. : Même si certains produits sont encore réalisés sur commande, le luxe n'est plus synonyme d'éloignement et se veut de plus en plus proche du consommateur par le produit, le magasin et la fidélisation. Le luxe est moins lié à une notion de prix, de distance et de lieu spécifique car, aujourd'hui, c'est le consommateur qui décide ce qui relève du luxe et ce qui n'en relève pas. S'il revient au luxe de faire toujours rêver sur une partie de son offre (la mode, par exemple), c'est sur l'univers des accessoires qu'il réalise le plus fort de son chiffre d'affaires et de sa marge.



L'extension du territoire de la marque ne risque-t-il pas de diluer son image ?

L-A P : La marque doit s'interroger sur sa légitimité (ses attributs) et son savoir-faire. Vuitton, symbole du voyage, pourrait faire des voitures à condition de pouvoir continuer à vendre des sacs et des malles. Lancôme, marque féminine, n'obtient pas le succès souhaité dans l'univers masculin. Sur le plan du savoir-faire, Armani, spécialiste du prêt-à-porter, a eu du mal à développer ses lignes de maquillage et d'accessoires. Il est indispensable d'avoir une définition claire des territoires de la marque pour cibler de façon optimale les investissements d'extension.



D'autres marchés adoptent les codes du luxe. Peut-on, par exemple, pour Actimel, parler de luxe au quotidien ?

L-A P. : Je ne le pense pas car Actimel entre dans la catégorie des achats rationnels. Le produit offre une promesse technique quand le luxe relève de l'irrationnel, du rêve et de l'achat d'impulsion.



Certaines marques ne peuvent-elles acquérir le statut de luxe dans d'autres pays que celui de leur origine ?

L-A P. : On peut, en effet, cité l'exemple de Montagut, marque middle market en France, mais marque de luxe en Chine où elle est confrontée aux problèmes de contrefaçon…

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