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Revue des Marques - numéro 26 - Avril 1999
 

 

L'UTILISATION À DES FINS PUBLICITAIRES D'UNE MANIFESTATION SPORTIVE


par Olivier Mendras, avocat à la cour de Paris

• Comme on a pu le constater récemment à l'occasion de la Coupe du monde de football, les grandes manifestations sportives suscitent l'intérêt d'une part de plus en plus large de la population et la tentation est grande de les utiliser comme thème de campagne publicitaire afin de bénéficier de l'impact que créé dans le public leur notoriété. Les organisateurs de ces manifestations l'ont d'ailleurs parfaitement compris puisqu'ils concèdent, moyennant des contreparties financières ou des conventions de partenariat, l'autorisation à certaines entreprises d'y faire référence dans leur publicité.
 
• Il advient toutefois que certains annonceurs, en dehors de toute convention et donc sans qu'ils bénéficient d'une autorisation expresse de leurs organisateurs, fassent référence dans leur publicité à une manifestation sportive en invoquant le fait qu'il s'agirait d'un événement de l'actualité appartenant à tous et donc de libre utilisation. De telles pratiques sont aujourd'hui, de manière systématique, sanctionnées par la jurisprudence généralement sur un double fondement, d'une part celui du droit des marques puisque la dénomination d'une grande manifestation sportive a généralement fait l'objet d'un dépôt régi par les dispositions du Livre VII du Code de la Propriété Intellectuelle et d'autre part, celui du parasitisme.
 
• Nous citerons ainsi un arrêt rendu le 20 novembre 1995 (PIBD 1996 - n°604 - II.71) par lequel la Cour d'Appel de Paris a confirmé un jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris ayant condamné une entreprise qui avait expressément fait référence aux Internationaux de Paris de Roland Garros dans sa publicité sans avoir obtenu l'autorisation de la Fédération Française de Tennis. La Cour a estimé que si le Tribunal avait " relevé à juste titre que ne saurait être incriminé le fait d'avoir utilisé le terme Roland Garros pour désigner la manifestation sportive ou le lieu dans lequel elle se tenait ", il avait " observé à bon droit qu'en revanche constituait un usage illicite de la marque déposée l'emploi de ce même terme pour qualifier non plus un événement de l'actualité sportive mais une opération à des fins personnelles de nature commerciale ".
 
• La Cour a donc considéré que l'entreprise en cause avait non seulement commis des actes constitutifs de contrefaçon de marque, mais qu'au surplus elle s'était rendue coupable d'agissements parasitaires car elle ne s'était pas " bornée à faire référence au tournoi dans un souci d'information du public mais s'était exactement placée dans le sillage de l'intimée (la FFT) et avait ainsi entretenu auprès de ses clients une équivoque qui lui permettait de percevoir, à peu de frais, les retombées économiques de la manifestation sportive visée ".
 
• Nous citerons également une décision rendue par la Cour d'Appel de Versailles le 15 janvier 1997 (PIBD - n° 643 - III.654) ayant sanctionné comme constitutive d'atteinte par exploitation injustifiée des marques d'usage notoires du Comité National Olympique l'utilisation par le Groupement d'achat des Centres Leclerc du terme " Olymprix " dans sa publicité, accompagnée de la formule " transporteur officiel des Olymprix " apposée sur les chariots mis à la disposition de la clientèle sur les lieux de vente. La Cour a estimé que les agissements incriminés avaient permis " à une entreprise de distribution de confisquer à son profit et sans contrepartie une notoriété et une image de marque ayant une autre vocation et seulement susceptibles de répercussions marchandes dans des conditions de collaboration qui auraient alors été à débattre avec les associations concernées et auraient revêtu un caractère onéreux " et qu'en conséquence sa responsabilité devrait être retenue conformément aux dispositions de l'article L.713-5 du Code de la Propriété Intellectuelle.
 
• Ces deux arrêts ne constituent que des exemples parmi les nombreuses décisions rendues dans ce domaine et appliquant les mêmes principes. Est ainsi confirmé le caractère erroné du raisonnement consistant à prétendre que l'on pourrait librement, sans autorisation de son organisateur, faire référence à des fins publicitaires et commerciales à une manifestation sportive au motif qu'il s'agirait d'un événement d'actualité.
 
• De telles pratiques sont donc excessivement risquées et cela d'autant plus que pour des raisons évidentes de sauvegarde des intérêts que représentent pour eux les concessions d'autorisation, les contrats de sponsoring ou de partenariat, les organisateurs de manifestations sportives réagissent maintenant de manière systématique et très ferme à l'encontre de ceux qui y font référence sans avoir négocié une autorisation.
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