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Revue des Marques - numéro 25 - Janvier 1999
 

 

L'USAGE DE LA MARQUE D'UN TIERS POUR IDENTIFIER DES LOTS PROMOTIONNELS
Considérant que l'utilisation de la marque d'un tiers, sans son accord, par l'organisateur d'une opération promotionnelle pour présenter les lots qu'il met en jeu, constitue un usage illicite de ladite marque, la Cour de Cassation a tranché les hésitations jusqu'alors existantes tant dans la doctrine que dans la jurisprudence.


par Olivier Mendras, avocat à la cour de Paris

• Le 2 juillet 1996, la Cour de Cassation a jugé que le propriétaire d'une marque est en droit de s'opposer à ce que les produits la portant puissent être diffusés dans le public dès lors que cette diffusion n'a pas pour objet leur commercialisation, mais leur remise aux gagnants d'une opération de loteriepublicitaire.(Chambre Commerciale- Aff.: Société La Redoute Catalogue C/ Société Parfums Christian Dior). Certains auteurs, et pas des moindres, estiment qu'en vertu de la règle de l'épuisement des droits, telle que consacrée par les dispositions de l'article L.713-4 du Code de la Propriété Intellectuelle, celui qui a régulièrement acheté les articles qu'il propose comme lots promotionnels, a acquis le droit de faire usage de la marque qui les désigne dans la publicité qu'il diffuse pour annoncer son opération.(voir notamment note de Paul Mathely-Annales de la Propriété Industrielle 1997-page 166).
 
• La Cour d'Appel de Paris avait adopté ce raisonnement dans une décision rendue le 19 novembre 1984 aux termes de laquelle elle a jugé que ne se livrait pas à des agissements d'usage illicite de marque une entreprise annonçant qu'elle offrait au gagnant d'une loterie des bouteilles de champagne Dom Perignon qui se trouvaient librement dans le commerce (4ème Chambre -Aff.: Société Moet & Chandon C/ Société Accor-Annales de la Propriété Industrielle 1984-page 200). Au cours de ces dernières années, la tendance de la jurisprudence s'est toutefois inversée et le Tribunal de Grande Instance de Paris a, le 10 avril 1996, condamné la société La Redoute pour avoir annoncé qu'elle offrait aux gagnants d'un concours publicitaire des foulards de marques "Guy Laroche", "Lanvin", "Balmain", ou encore "Yves Saint Laurent" (Gazette du Palais 8-10 décembre 1996-page 18).
 
• Dans le même sens, le Tribunal de Grande Instance de Versailles a condamné la même société de vente par correspondance pour avoir indiqué qu'une loterie promotionnelle qu'elle organisait permettait de gagner des produits de marque "Cartier" en soulignant que si le propriétaire d'une marque ne peut s'opposer à ce qu'elle soit utilisée pour la commercialisation de ses produits "se rend coupable d'un détournement de son usage, parfaitement illicite, celui qui ne l'a pas utilisé pour promouvoir les produits de cette marque, mais ses propres produits" (TOI Versailles -Première Chambre-25 juin 1996-Gazette du Palais 8-10 décembre 1996-page 18).
 
• L'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 2 juillet 1996 vient donc entériner la position adoptée ces dernières années par la jurisprudence des juridictions du 1er degré et des Cours d'Appel et l'on ne peut que s'en réjouir car cette position est conforme au droit, comme au bon sens économique. La règle de l'épuisement des droits qui est dérogatoire au principe selon lequel le titulaire d'une marque détient sur cette dernière un droit absolu, ne doit pas être appliquée de façon trop extensive et il convient de rappeler qu'elle est d'ailleurs tempérée par les dispositions du second alinéa de l'article L.713-4 qui prévoient qu'elle puisse être remise en cause lorsqu'il est justifié d'un "motif légitime".
 
• On doit considérer qu'il est parfaitement légitime pour le titulaire d'une marque, et plus particulièrement lorsqu'il s'agit d'une marque prestigieuse, de ne pas admettre que la simple acquisition de quantités, qui au surplus peuvent être limitées, de ses produits permette, à l'acheteur de bénéficier de son caractère attractif et de l'utiliser dans des conditions non cohérentes avec l'image qu'il souhaite en donner, de telle sorte qu'elle risque d'être gravement dépréciée et avilie.
 
• Le propriétaire d'une marque, et plus particulièrement le propriétaire d'une marque notoire ou prestigieuse doit conserver la maîtrise de l'usage qui en est fait par les autres agents économiques et il faut donc espérer que l'arrêt rendu le 2 juillet 1996 par la Cour de Cassation fixe de manière définitive la jurisprudence.

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